Sarkozy pris de court par le référendum en Grèce
Source : L'Express.fr - le 1er novembre 2011
En s'invitant au G20, la question grecque bouleverse les plans de Nicolas Sarkozy.
Deux jours avant d'accueillir le sommet du G20 à Cannes, Nicolas Sarkozy se retrouve dans une situation politique très délicate après l'annonce surprise d'un référendum grec qui remet en cause le plan de sauvetage de la zone euro arraché de haute lutte à Bruxelles.
Le président de la République a réuni les principaux ministres concernés à l'Elysée ce mardi. Au sujet du projet de référendum de George Papandréou, le Premier ministre grec, il a assuré: "Cette annonce a surpris toute l'Europe. La France tient à rappeler que le plan adopté jeudi dernier à l'unanimité des 17 membres de la zone euro est la seule voie possible pour résoudre le problème de la dette grecque".
Le président de la République a poursuivi: "Donner la parole au peuple est toujours légitime mais la solidarité de tous les pays de la zone euro ne saurait s'exercer sans que chacun consente aux efforts nécessaires".
Et il a conclu en indiquant que la France et l'Allemagne ont pris l'initiative de réunir mercredi, avant le sommet du G20 à Cannes, les représentants des institutions européennes, du FMI et le Premier ministre grec, "pour examiner les conditions dans lesquelles les engagements pris seront tenus".
Il y a cinq jours seulement, quelques heures après un sommet européen "crucial", le chef de l'Etat expliquait à la télévision comment l'accord de Bruxelles allait permettre de sauver la Grèce et d'éviter une "catastrophe" financière à l'Europe et au monde entier.
"Si la Grèce était en faillite, il y avait un processus en cascade qui emportait tout le monde", assurait alors Nicolas Sarkozy, avant de se déclarer optimiste sur les capacités de la Grèce à se sortir de la crise, pour peu qu'elle consente aux "efforts" imposés par ses partenaires.
Moins d'une semaine plus tard, tout est à refaire. Le coup de théâtre provoqué par Georges Papandréou a immédiatement fait chuter les marchés financiers, replonger la zone euro dans la crise et a mis les autorités françaises dans l'embarras. "C'est la surprise totale, on n'a rien vu venir", résumait, mardi à l'AFP, une source proche du gouvernement.
Signe de la gravité de la situation, Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel n'ont pas tardé à réagir. Lors d'un entretien téléphonique, les deux principaux artisans du dispositif approuvé à Bruxelles ont répété leur détermination à le faire appliquer et sont convenus de se retrouver dès mercredi à Cannes, d'abord avec l'UE et le FMI, puis avec Georges Papandréou en personne, pour reprendre l'initiative. Le chef de l'État a également organisé une réunion de crise avec le Premier ministre François Fillon, les principaux ministres concernés et le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer.
Tout le G20 remis en cause
À la veille de la réunion de Cannes, l'annonce d'Athènes ne pouvait pas plus mal tomber. Nicolas Sarkozy comptait débarquer sur la Croisette en position de force, avec en poche la réponse "globale, ambitieuse et crédible" à la crise de la zone euro promise à ses partenaires. Initialement, le plan de sauvetage de l'UE devait être simplement "présenté" au G20. Le référendum grec risque de refaire de la situation financière du Vieux Continent le principal sujet de discussion et d'inquiétude des 20 pays les plus riches de la planète, et de reléguer au second plan les autres priorités sur lesquelles Paris espérait obtenir des "avancées concrètes".
"Pour négocier une sortie de crise globale avec les partenaires du G20, Sarkozy n'est pas en position optimale", note le président du cercle de réflexion proche du PS EuropaNova, Guillaume Klossa. Mardi, la droite s'est donc déchaînée contre le "socialiste" Papandréou. L'ex-ministre UMP Christian Estrosi a déploré la remise en cause des efforts déployés par le président et a dénoncé une décision "totalement irresponsable".
À l'inverse, la gauche - à l'exception du PS, resté silencieux - a salué l'annonce d'un référendum. La candidate écologiste à la présidentielle, Eva Joly, a salué une "porte (ouverte) à une autre discussion" et celui du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon, y a vu le signe d'un "minimum de démocratie". Quant à Marine Le Pen (Front national), elle a jugé qu'elle constituait "un moyen de préparer la sortie de l'euro".
Sur le front de la politique intérieure, l'annonce venue d'Athènes contrarie également la stratégie de Nicolas Sarkozy, qui, après Bruxelles, entendait bien profiter d'un sommet du G20 réussi pour soigner sa position de président au chevet du monde et "protecteur" des Français. Et cultiver sa différence avec son rival socialiste François Hollande, jugé "inexpérimenté" mais donné largement gagnant à six mois du scrutin présidentiel.
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