'Le référendum d'initiative populaire
déverrouille le débat démocratique"
Source : LIBERATION.FR - le 22 décembre 2010
Interview - Après l'adoption par le Conseil des ministres du projet de loi, le député Vert François de Rugy, plaide pour une "démocratie plus ouverte et non réservée au Président, au gouvernement et au Parlement".
Le Conseil des ministres vient d’adopter, ce mercredi, son projet de loi définissant la mise en œuvre d’un «référendum d’initiative populaire».
Comment ça marche? Il suffit qu'un parlementaire dépose une proposition de loi. Que celle-ci soit soutenue par au moins un cinquième des parlementaires, puis contrôlée par le Conseil constitutionnel. Avec le feu vert des Sages, et dans un délai de trois mois, s’ouvre alors la collecte des signatures de citoyens inscrits sur les listes électorales qui peuvent approuver le texte par voie électronique. Si la proposition de loi franchit la barre des 4,5 millions de soutiens, elle retourne au Parlement et sera débattu par chacune des deux assemblées dans les douze mois. A défaut, le président de la République soumet le texte au référendum dans un délai de quatre mois.
Le député Vert, François de Rugy, a été le rapporteur d’une proposition de loi organique prévoyant d’appliquer le référendum d’initiative populaire, présentée début décembre et rejetée par l’Assemblée. Il revient sur ce dispositif prévue par la réforme des institutions (article 11), mais qui n’avait pas encore été concrétisé.
Êtes-vous satisfait que le gouvernement avance sur le référendum d’initiative populaire, plus de deux ans après l’adoption de son principe dans le cadre de la révision constitutionnelle ?
Très modestement, je pense que l’initiative des Verts a mis la pression sur le gouvernement pour qu'il accélère et sorte enfin ce texte fantomatique qu’on ne voulait jamais nous donner. Depuis deux ans et demi, la présentation de ce projet de loi a été sans cesse repoussée pour une raison politique, je crois: le président de la République, son gouvernement et une partie de sa majorité ont peur de cet outil, ont peur que les citoyens et l’opposition s’en saisissent.
D’ailleurs, cette mesure n’était pas, au départ, dans le projet du gouvernement de réforme des institutions mais y a été introduite par un amendement d’Arnaud Montebourg (PS). Noël Mamère (Verts) et François Sauvadet (Nouveau Centre) en avaient aussi déposé un. Il figurait aussi parmi les propositions du comité Balladur sur les institutions. Le dispositif a ensuite été raboté par l’UMP ce qui explique qu’il soit finalement si restrictif.
Qu’a-t-il de restrictif ?
La barre des 4 millions et demi de signatures pour approuver un texte est extrêmement élevée: nous plaidions pour fixer le seuil à 500.000 signatures. Tout comme la barre d’un cinquième des parlementaires.
Et puis il s’agit d’un référendum d’initiative partagée, entre citoyens et parlementaires, et non à 100% d’initiative citoyenne. Si nous avions nous-même rédigé cet article 11 de la Constitution, nous l’aurions fait de manière plus ouverte.
Enfin, le gouvernement voulait introduire une autre restriction, empêchant un référendum dans l’année précédant une élection présidentielle: rien ne serait alors possible avant 2012. Nous proposions un délai de trois mois avant l’élection et la possibilité de coupler un référendum avec une présidentielle.
Tout en jugeant le dispositif insuffisant, vous saluez tout de même une avancée démocratique. Pourquoi ?
C’est un outil qui permet de déverrouiller le débat démocratique. Ces dernières années, il y a eu des sujets susceptibles de déclencher une très large mobilisation: sur le maintien du statut de la Poste, deux millions et demi de personnes ont participé à la votation citoyenne et la réforme des retraites a mis près de trois millions de personnes dans la rue.
On peut décider que la démocratie est plus ouverte et non pas réservée au Président, à son gouvernement et au Parlement. Il faut accepter des procédures nouvelles qui donneront lieu à des pratiques nouvelles. Car la référendum d’initiative populaire peut aussi susciter des débats, créer des mobilisations et servir de moyen de pression. Même si la procédure ne va pas jusqu’à son terme et si le nombre de soutiens n’est pas atteint, avec 1,5 ou 2 millions de signatures, il sera difficile pour un gouvernement de refuser catégoriquement d’entendre parler d’un sujet.
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